•                                  
                                        Portrait de Françoise, une passante, par Picasso

     


       Elle n'a plus beaucoup de temps à vivre. Le vivant a pour pire ennemi ce qui passe sans jamais revenir. Ne pouvant se défaire de ses griffes et regardant son visage prendre des rides. elle n'avait jamais réellement cru qu'un jour elle deviendrait vieille, qu'elle deviendrait une grand mère. Oui bien sur, elle a vu ses articulations vieillir, elle a vu son corps changer, elle ne pouvait plus manier son corps comme avant. Elle savait qu'elle allait vers la vieillesse, mais tout est allé si vite qu'elle n'a pas eut le temps de comprendre qu'elle n'était plus une jeune fille. Mais le cœur, lui, est différent, il change et vieillit à son rythme, parfois il régresse même. Pour elle, il n'avait pas changé. Son cœur était resté toujours bloqué au même instant de sa vie, il n'avait plus changé. Il était resté le même. Comme si la vie de son cœur c'était arrêté à ce moment là, restant immobile, enfermé dans un corps, attendant qu'il meure car lui n'avait plus de vie. Son cœur était resté jeune et innocent, plein d'amour et de douleur. Beau et éclatant, tandis que son corps ressemblait toujours un peu plus à l'écorce d'un vieil arbre. Heureux ou malheureux, il était difficile de juger ce qu'était son chemin. Certains se moqueront d'elle, d'autres l'admireront pour sa fidélité de cœur. Quant à elle, elle ne c'était jamais interrogée sur son propre bon sens. Car tandis que nous essayons d'oublier les sentiments qui nous sont douloureux, elle, elle gardait le sien comme un oiseau blessé, même si elle savait qu'il ne pourrait plus jamais voler.
       Une vielle dame, voilà tout ce qu'elle voyait dans le vieux miroir de son salon. Les cheveux blancs, pendants comme des fils d'araignée sans destinations. Mais elle ne pensait jamais à son apparence ou même à elle-même, comme extérieure à son corps elle laissait parler son cœur qui ne pensait qu'à ce visage tant aimer. Le visage d'un jeune homme, bien loin de sa peau craquelée de vieille dame. L'amour qu'elle lui portait était un affront de la vieillesse à la jeunesse. Une grand mère ne désire pas un enfant ! Et pourtant, c'était bien un enfant au visage angélique qu'elle aimait, un enfant qui n'est plus qu'un souvenir transformé par le temps. Car voilà des décennies qu'elle caressait la peau blanche de son amour. Il y a longtemps ils se regardaient les yeux dans les yeux, ne voyant que l'éternité devant eux.
       Les histoires de la vie sont parfois belles, parfois tristes, parfois les deux à la fois. La vielle dame vécu une belle histoire d'amour et puis elle se finit, comme beaucoup d'autres histoires. Mais pour le cœur d'enfant qu'elle a toujours possédée, les histoires d'amour ne se finissaient jamais. Car comment les histoires d'amour pourraient être des histoires d'amour si elles avaient une fin, et que le couple ne s'aimait plus ? Les histoires d'amour ne pouvaient finir comme ça ! Elles étaient belles et éternelles ! Comment pouvait-on un jour aimer de la façon la plus pure et la plus magique pour ensuite se lasser et se délaisser ? Non, l'amour n'était pas comme ça pour la vieille dame au cœur d'enfant, quand on aimait c'été à jamais, peu importe comment était l'autre, on l'aimait de tout son cœur, et quoi qu'il puisse arriver on revenait vers l'autre.
       Alors la vieille dame attendit. Elle attendit longtemps. Elle l'attendit toujours. Elle l'attendait à jamais.
    Aujourd'hui, alors qu'un demi-siècle était déjà passé, elle croyait savoir qu'il ne reviendrait jamais vers elle, et pourtant, malgré tout, elle avait toujours un espoir au fond de son cœur. Et lorsque le doute apparaissait elle se disait :
    " Il ne reviendra peut-être jamais, mais moi, je peux rire devant le monde et jurer devant tous que j'ai vécu le grand amour et que jamais je n'ai faillit. "

     

    De moa



    1 commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires