• Les larmes du désir - Lalie Walker

     Toujours le hasard.
    Alors que je dérivais sur le net, je suis tombée sur ce texte.
    Sombre, il nous plonge dans les pensées d'un personnage torturé.
    Ce n'est que le début du texte que j'affiche là, pour lire la suite, cliquez
    ICI .


     

    Extrait: Les larmes du désir



    "
    Serai-je un jour assez belle pour me refléter dans les larmes du désir ?



    Les doigts valsaient dans les cheveux, étreignaient les mèches auburn. Le mouvement se faisait plus présent, et le geste plus appuyé. L'invitait à s'immerger dans un univers sensoriel, dont elle ignorait tout. Tumulte. Ravissement. Et, à fleur de peau, le sentiment d'être à la frontière indéfinie de sa féminitude. Irrévélée. L'impression d'être enfin belle dans le regard de l'autre.



    Mais Sandro ne la voyait pas. Pas vraiment.



    Demeurait concentré sur la texture.



    Elle leva les yeux, chercha les siens et, ne les trouvant pas, se cogna à ses mains. Un va-et-vient voluptueux, entre danse et sculpture, destiné à faire émerger la beauté d'une matière encore brute et informe.



    Des mains faites pour aimer.



    Qu'elle imagina s'emparer de son corps et lui redonner vie, jusqu'à la jouissance. Un désir dont la violence la heurta. Lui coupa le souffle. À lui en faire baisser les yeux ; puis, les relever.



    Soucieux.



    À l'affût des autres.



    De ces soupirantes et jacassantes qui, impudiques, s'admiraient et se laissaient envoûter par d'autres doigts, aussi habiles que sensuels.



    Qu'est-ce que la beauté ?



    Une invention des humains qui se rêvèrent des dieux, rugit-elle.



    Tout en-dedans.



    Dans cet intime où personne ne se rendait jamais. Où personne ne songeait à faire halte.



    La beauté ? Un meurtre prémédité déguisé en sélection naturelle !



    La bouche amère, elle observait une tache dans le miroir.



    Monstrueuse.



    Son reflet.



    Insoutenable.



    Ne vit plus alors que le monstre en elle, qui tentait de déborder des contours de la glace, désireux de s'échapper pour ré-incorporer l'unique corps capable de soutenir sa disgrâce.



    Le mien.



    Elle le savait.



    À peine posés, les regards se détournaient d'elle, repartaient vers un ailleurs qu'elle devinait paradisiaque. Tandis que la mémoire du miroir, elle, conserverait son souvenir. Un instant pourtant d'ores et déjà révolu.



    La réfléchissait à nouveau.



    Obscène.



    Difforme.



    Et, néanmoins, transparente aux yeux des hommes.



    Inexistante.



    Elle se sentit mourir.



    S'écraser à l'intérieur de cette chair qui, bien que sienne, n'en était pas moins perçue comme étrangère.



    Battant des cils, elle s'écarta de la surface polie où s'étaient contemplées tant de figures de femmes, qui l'amoindrissaient encore. Toujours plus. Un besoin irrépressible de leur refaire le portrait de la pointe d'un couteau la submergea. Tout aussi impérieux fut le désir de les effacer une à une et, si possible, d'en profiter pour leur dérober ce qu'elle ne possédait pas.



    Elle intercepta l'image d'un jeune homme. En pleine mutation. Docilement radieux sous les doigts experts d'une brune, avenante et rieuse.



    Libre dans son corps.



    Indécente !



    Irritante, l'envie lui assécha la bouche.



    Fielleuse, elle se propagea à tout le derme. S'interdisant de se gratter les bras, jalouse, elle se figea ; meurtrie, elle s'enfonça dans son siège.



    Pourquoi n'avait-elle pas reçu, en guise de cadeau de bienvenue, une jolie silhouette dotée d'un visage rayonnant ? Mais avait hérité de la lourdeur paternelle, des plis et replis adipeux de l'obèse, et de ce ridicule faciès poupin qui ne seyait pas à une femme de trente ans ?



    Qui, la faisant brutalement régresser aux premières loges de sa maudite vie de fille, la renvoyait dans les jupes soyeuses de sa mère. Durant toute son enfance, cette dernière n'avait eu de cesse de lui vanter la générosité des fées-marraines. À se demander ce que ces garces fabriquaient à l'heure de sa naissance ! Sans doute avaient-elle eu mieux à faire ce jour-là. Avec une plus belle qu'elle.



    Qui croire, après ça ?  [...]
    "



        Lalie Walker
    Lien :
    http://www.larevuedesressources.org/article.php3?id_article=707


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